« Tu vas encore pouvoir goûter du vin alors ! ». Difficile de compter combien de fois j'ai entendu cette phrase avant de partir pour l'Afrique du Sud. Il se murmure même que certains vins blancs n'auraient rien à envier aux meilleurs Alsace. Pour ne pas mourir idiots, nous sommes donc allés, Fred et moi. Et nous ne le regrettons pas ! A la vôtre !
Comme d'habitude, quelques précisions historiques : la première vendange en Afrique du Sud a eu lieu en 1659. Toutefois les premiers colons n'y connaissent pas grand-chose, et c'est donc le désormais bien connu Simon Var der Stel qui permit le développement qualitatif de la viticulture sud-africaine. Mais l'impulsion décisive est donnée par l'arrivée vers 1690 dans la vallée de Franschhoek de 200 huguenots chassés de France après la révocation de l'Edit de Nantes.
Les premières importations vers l'Europe datent elles de 1761. Plus tard, durant l'Apartheid et le boycott international des produits sud-africains, la viticulture s'est enlisée pour véritablement renaître à partir des années 1990, après la libération de Nelson Mandela.
Contrairement à la France, les vins sont vendus sous leur nom de cépage (et non en fonction des terroirs de production). C'est pourquoi, chose assez étonnante, on a le droit de procéder à des assemblages de cépages ne provenant pas de la même région géographique.
Aujourd'hui (du moins en 2005), l'Afrique du Sud est le neuvième producteur mondial de vins. Elle dispose de 100 200 hectares de vignes (un peu moins que le vignoble bordelais...) et la vendange 2005 est estimée à 593,1 millions de litres.
Il est donc temps d'aller découvrir tout ca, avec l'aide de notre guide Niel et de son minibus Volkswagen !
Fred, Neil et moi !
Notre destination ? Là :
C'est un peu petit et on n'y voit pas grand-chose, mais il suffit de savoir que chaque point représente un domaine viticole. On n'est donc pas près de s'ennuyer !
1) Jordan Wines
La première étape nous emmène dans le domaine Jordan, qui offre une magnifique vue sur la vallée de Stellenbosch (seul le soleil nous a manqué).
Nous avons le droit à une visite privilégiée de la cave. On peut y apercevoir les presses à raisins et les différentes cuves de fermentation. Détail étonnant, l'irrigation des vignes est autorisées, alors qu'elle est interdite en France.
Le vin vieillit alors dans des tonneaux en bois quasiment tous fabriqués en France, dont certains à Bordeaux :
Par ailleurs, certaines bouteilles ne sont pas millésimées sans que cela fasse scandale ! La notion de "mis en bouteille à la propriété", si importante chez nous, n'a donc ici qu'une valeur mineure.
L'heure de la dégustation a maintenant sonné. L'avantage c'est qu'il y en a de toutes les tailles :
Concentrons-nous sur les vins blancs pour débuter. Le Chenin Blanc est de loin le cépage le plus cultivé en Afrique du Sud (plus de 20% du vignoble), sous le nom de "Steen". Originaire de l'Anjou, importé par les huguenots, il donne le plus souvent un vin sec. On trouve ensuite le Colombard, qui provient de vignes assez petites donnant un vin sec et assez mur, puis le Sauvignon. Ce dernier possède un arôme caractéristique dont les principaux descripteurs sont le genêt, le buis, le bourgeon de cassis, le pamplemousse, et le fruit de la passion !
Notre coup de coeur
Incontestablement, il va au Chardonnay 2007. Le Chardonnay est un cépage vigoureux qui donne ici un vin très fin avec très souvent un fort potentiel aromatique (arômes d'acacia, d'amande, de banane, de beurre frais, de cannelle, de cassis, de citron, etc....). En simples amateurs que nous sommes, on a adoré. Environ 7,75 euro la bouteille.
2) Rustenberg Wines
Ensuite, direction le nord vers le domaine Rustenberg. Première surprise : nous entrons dans un domaine immense de plus de 1 200 hectares.
La majorité des employés de l'entreprise ont même leur propre maison à l'intérieur.
Un immense jardin entoure également les bâtiments principaux.
Puis on passe à la dégustation :
Fred, moi, santé !
Deuxième surprise : les verres utilisés ! Première fois que je vois ça : il s'agit d'une fabrication autrichienne, et au lieu de faire tourner le verre avant la dégustation, on le fait rouler sur la table.
Intérêt ? On ne sait pas trop, mais c'est très professionnel !
En tout cas, petite halte sur les vins rouges. C'est le Cabernet-Sauvignon, également majoritaire dans le bordelais, qui domine. Ce cépage, très chargé en tanins, donne des vins aptes au vieillissement, bien charpentés. Les vins sud-africains sont souvent dominés par des notes boisées ou chocolatées. On trouve également le Pinotage, cépage de cuve noir obtenu par Abraham Perold en 1925, alors chercheur de l'université de Stellenbosch. Il s'agit d'un croisement du pinot noir avec le cinsault. N'oublions pas le Merlot, originaire de la région de Libourne, permettant de produire des vins fruités, fins et colorés ou des vins de garde amples, structurés et complexes.
Notre coup de coeur
C'est un rouge qui l'emporte ici, le Brampton Shiraz 2006. Il se déguste parfaitement avec le « Biltong », la fameuse antilope séchée. Le Shiraz présent un arôme de café torréfié, d'épices, de musc, de fumé avec un boisé très marqué. Excellent rapport qualité/prix à notre avis. Environ 4,20 euro la bouteille.
3) Thelema Wines
Rapide halte au pied de la montagne de Simon !
Le temps d'admirer le décor, de goûter deux verres, et hop on repart tellement c'était blindé de monde. Dommage, il s'agissait pourtant d'une propriété reconnue. Pas de coup de coeur...
13h passé, à table. Nous avons pu enfin tester le springbok, sous forme d'un « pot au feu » servi avec du riz. Délicieux !
On se retrouve alors à Franschhoek pour la visite de la chocolaterie Huguenot.
Un retour dans ce petit coin français est prévu bientôt, pour le week-end du 14 juillet.
4) Graham Beck Wines
Pour digérer, rendez-vous chez Graham Beck !
Ambiance bar à vins, et on ne risque pas de mourir de soif !
C'est ici qu'on a découvert le champagne sud-africain. Enfin non, pas champagne, mais « Cap Classique », appellation choisie pour désigner les vins effervescents sud-africains haut de gamme parce que le terme « méthode champenoise » ne peut être utilisé que pour les vins élaborés en... Champagne.
Seules les variétés spécifiques de raisins blancs et rouges (cueillis à la main) sont utilisées en raison de leur riche complexité et de leur fruité délicat. Les cépages retenus sont le Sauvignon blanc, le Chenin blanc, le Chardonnay et le Pinot noir. Le pressurage est au centre du processus d'élaboration du vin. Seul le premier pressurage est utilisé pour les vins de base destinés à recevoir l'appellation Cap Classique. Le vin est alors embouteillé et les bouteilles reposent horizontalement dans les caves pendant 12 mois minimum pour la prise de mousse.
Notre coup de coeur
Sans surprise, le Méthode Cap Classique Brut est élu à l'unanimité ! Concurrent comme indiqué de notre champagne national, il nous a offert une bonne digestion. Environ 7,35 euro la bouteille.
5) Solms Delta Wines
Dernière halte de la journée (oui parce qu'après la tête commence à tourner, et on s'éloigne de la dégustation...). Ce domaine possède un mussée de l'histoire de la province du Cap très intéressant.
Notre coup de coeur
Pour la dernière, on a choisi le dernier vin, qu'on nous presque forcé à goûter, mais dont on est finalement reparti avec une bouteille. Cape Jazz Shiraz (Petillant Red), véritable Lambrusco sud-africain. Une agréable surprise !
17h30, retour à Stellenbosch, fin de l'excellente journée ! Thanks Niel, and see you !
